Etats-Unis, Roman

Sunset Park

Paul Auster, Sunset park

De retour dans sa ville natale, Miles squatte une petite maison abandonnée en compagnie de son ancien ami Bing et de deux locataires, Alice et Hellen. L’auberge espagnole, jusqu’à l’expulsion par les forces de police…

Abandon

C’est le roman des départs et des retrouvailles. Notre héros abandonnent successivement maison, parents, études, amie, travail … Une fuite en avant pour ce juif errant qui le ramène in fine au point de départ. Le retour de l’enfant prodigue. Après avoir cessé tout contact avec sa famille, il reviendra vivre chez son père. Au même point, mais différent.Cette histoire est placée sous le signe de l’abandon. Ayant fui New York et ses parents, Miles travaille en Floride et s’affaire à vider les maisons abandonnées par les familles victimes de la crise économique. “Chacune de ces maisons est une histoire d’échec – de faillite” (p.7), à l’image de la destinée de notre personnage. Dans un monde en difficulté, alors que la faillite des banques fait rage, Miles s’occupe des “choses abandonnées” (p.10).Menacé de dénonciation à la police, il doit quitter son amie, jeune fille orpheline. Il fait le chemin inverse en fuyant à nouveau et revient à New York pour vivre avec Bing et deux locataires. Tous habitent une maison abandonnée à Sunset Park. Miles reprend l’activité de son ami qui tient un magasin de réparation, “l’hôpital des objets cassés” (p.78), ces objets obsolètes (machines à écrire, stylos à encre, électrophones…) sauvés de l’abandon.Il devra encore quitté la maison qu’il squatte, expulsé violemment par la police avec ses colocataires, avant de se réfugier chez son père avec Pilar.

Aller et venue

Tous ces départs s’accompagnent d’un mouvement retour, de retrouvailles après les séparations. Quitter pour mieux revenir, abandonner pour mieux retrouver:

  • son ancien ami, Bing;
  • Pilar, qui viendra poursuivre ses études à New York;
  • l’université, où il reprendra ses études;
  • sa mère, actrice célèbre au théâtre, qui l’a abandonné jeune enfant;
  • son père, éditeur indépendant, qui l’a laissé tout quitter sans pour autant se défaire de sa responsabilité parentale.

Ces allées et venues sont possibles grâce au lâcher-prise dont fait preuve le père, figure paternelle en cela exemplaire :

“Toujours tenté (…) de prendre son garçon dans ses bras et de l’embrasser, mais sans jamais rien faire, sans jamais rien dire, restant caché, regardant Miles vieillir, regardant son fils devenir un homme.” (p.185)

Oh les beaux jours

Et il se pourrait bien que ce soient là “les plus belles années de notre vie“, à l’égal de ce film ancien dont Alice a fait le sujet de sa thèse, et qui cristallise l’esprit du roman. De belles années qui donnent lieu à des changements heureux pour la plupart des personnages:

  • Bing connaît la reconnaissance comme batteur dans un groupe rock;
  • Alice termine sa thèse et s’occupera de la défense des écrivains emprisonnés avec une organisation humanitaire;
  • la timide Hellen se révèle dans ses dessins de nu et trouvera en un ancien ami l’homme de sa vie;
  • la mère, actrice, se découvre maman en recevant sans simulation son fils, en connaissant le trac;
  • le père, éditeur en difficultés financières, reçoit le soutien des membres du personnel.

Oh les beaux jours!, pour reprendre le titre de la pièce de Samuel BECKETT que la mère de Miles interprète au théâtre avec succès.Comme toujours avec Paul AUSTER, c’est intelligent, bien construit, très intellectuel. Et heureusement, malgré le ton impersonnel du récit, l’ensemble est heureux grâce à un peu de sensibilité.—–Paul AUSTER, Sunset Park, Actes Sud, 2011, 317 p.- titre original “Sunset Park”- traduit de l’américain par Pierre FURLAN.

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Repris sous:Etats-Unis, Roman
Références: Sunset Park, Actes Sud, 2011, 317 p.
- titre original "Sunset Park"
- traduit de l'américain par Pierre FURLAN

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