Essai, Photo

Diane Arbus

Violaine Binet, Diane Arbus

Violaine BINET, journaliste, fait le portrait de Diane Arbus, figure mythique de la photographie américaine, morte suicidée en 1971. L’art de la photographe reste un mystère que l’on approche en compagnie de l’auteur. Ses photographies restent dans notre mémoire, comme quelque chose de pervers, dérangeant, effarant, que l’on s’acharne du regard à vouloir comprendre. On reste souvent interdit devant le portrait de ces gens que Diane ARBUS a photographiés sans concession, en un face à face cruel, sous une lumière crue.

Ambivalence névrotique

La journaliste place d’emblée la photographe américaine sous le signe de la dualité. Elle met en avant le portrait réalisé de deux soeurs jumelles, les “twins”, semblables et pourtant différentes.

“L’une sourit, l’autre s’absente.” (p.15)

Cette photo est présenté ici comme l’autoportrait de l’artiste, marqué à jamais par l’ambivalence, une dualité névrotique. La  photographe fut en effet sans cesse tiraillée, taraudée entre deux extrêmes, comme si deux personnes coexistaient ensemble en elle.

Noir et blanc

La fêlure se marque tôt dans l’histoire de cette femme. Sa mère souffre de neurasthénie, son père plus exhubérant est une personnalité flamboyante; commercial dans un grand magasin, il se passionne pour le théâtre amateur où il excelle sous les feux de la rampe. Diane Arbus oscille entre ces deux êtres opposés.

Ombre et lumière

Cette bipolarité familiale, cette ambiguité qu’illustre parfaitement le portrait des deux soeurs jumelles, se retrouve dans les sentiments que Diane nourrit pour sa famille, entre froideur ou attachemlent.Envers son mari Allan Arbus avec qui elle fait ses premiers pas en photographie, elle représente le côté sombre, alors que lui s’adonnera aussi au théâtre. Ils forment un couple (“On aurait dit des jumeaux”) composé de deux êtres opposés. Lui excelle dans la technique de développement ou de tirage photographique, alors qu’elle maîtrise la prise de vue sur le vif.

Un autre monde

Dans son travail, Diane Arbus ira là où elle n’est jamais allée, selon ses propres dires. Elle nous donne à voir ce que nous n’aurions jamais vu. Autre chose, un autre monde, fait de monstres (les freaks), des travestis, des malades mentaux ou des nudistes. Elle montre l’envers du décor, les coulisses de notre existence ordinaire. Quand elle fait le portrait de l’homme différent, elle nous montre un être comme les autres; dans ses portraits de personnes “normales”, nous voyons quelque chose de monstrueux. Jamais ses photographies en face à face, en noir et blanc, ne sont lisses ou vides. Ces photos de rue ne sont pas un art de l’instant, mais résultent d’un long travail d’approche en amont.

Toute une histoire

Le travail de Diane Arbuis condense l’art du storytelling, pour une communion avec le spectateur. Les règles sont respectées:

  • faire simple et court
  • raconter une histoire
  • faire naître une émotion.
La prouesse chez l’artiste aura été de communiquer en ce sens à partir de deux fois rien, ce presque rien qui fait tout. Deux soeurs jumelles posent côte à côte, un gamin jouant dans le parc s’irrite de la longueur de la pose, deux jeunes gens amoureux se tiennent devant l’objectif avec un air trsite… Qu’y a-t-il là à voir? De cette question en nous naît toute une histoire.

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